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Chapitre 192

Intronisation de Messire Francis LECLER (Marc NAVETGrand Rhétoriqueur)

Francis leclercCher Francis, vous introniser aujourd’hui est pour moi un honneur car nous avons grandi dans le même pâté (de) maison, nous avions le même facteur de part et d’autre d’une même route, d’une même rue, d’un même axe dédié à un autre facteur (d’instruments, cette fois), Adolphe Sax.

Des primaires à Saint-Perpète où M. Lurquin, d’un air faussement débile, vous demandait de lui rapporter, pour demain, du boudin de crocodile. Des secondaires commencées à Malonne à l’institut Saint-Berthuin mais où le statut d’interne ne vous convenait pas trop bien. Puis les études de boucherie où il fallait tailler des bavettes mais en fermant son bec, où vous avez appris à distinguer, au premier coup d’œil, les steaks des pastèques et où il fallait exécuter les gestes de découpe comme le montraient les enseignants sur des carcasses de viande dont vous vous décarcassiez en saignant. Et surtout alors ne pas glisser par inadvertance dans l’hémoglobine et risquer malencontreusement de se casser la bobine.

Notez que, pour la formation de futurs bouchers, il est bon, de temps en temps, de savoir se ...viander !

Puis il est temps de trouver une compagne efficace et proprette. Vos parents craignaient que vous ne fassiez ...une boulette.

Ils espéraient que vous tomberiez amoureux d’une jeune fille qui vous convienne Pas une fainéante. Ni une droguée. Ou pis que ça : une végétarienne !

Vous rencontrez alors Maggy dont le regard attendrit sœur, père et mère d’un même coup. Elle vous fit un effet bœuf. Et comme elle avait les seins doux,

vous l’avez emmenée dans votre chambre... froide et, très vite, lui avez fait deux lardons. Francis fut donc très bien épaulé. Il a toujours travaillé avec rigueur et précision. Alors que d’autres bouchers se font seconder par une multitude de bras où chacun s’affaire : certains servent ici, d’autres servent là. Vous, vous travailliez en famille, intensément sans beaucoup de pauses. Et, alors que vos concurrents multipliaient les préparations en sauce qu’ils pensaient être plus appétissantes juste parce que les sauces y sont. Vous, vous privilégiez les matières premières de qualité et la fabrication « maison ». Et, de toutes façons, dans le cochon, tout est bon, chère Madame. D’où qu’il vienne : depuis le cochon d’Inde jusqu’au porc d’Amsterdam !

Connu dans le quartier comme quelqu’un de serviable et de dévoué, avec votre bichon, sur le boulevard, un matin, vous apercevez la sacoche qu’une dame distraite, sur le toit de sa voiture, a oubliée. Vous appelez immédiatement la police pour le signaler. Deux agents arrivent très vite sur place, se mettent à rigoler et surtout à vous expliquer qu’en réalité, il ne s’agit pas du tout d’une sacoche, d’une trousse, d’un plumier en cuir verni mais de la housse de protection de l’enseigne lumineuse d’un taxi qui, ce jour-là, n’est pas en fonction. L’incident est clos. La maréchaussée tourne bride et notre boucher tourne ...dos.

Alors que fin d’année, on procède à l’élection de miss Univers dans un pays lointain, Vous, les charcutiers, c’est tout l’inverse, vous préférez élire le plus beau ...boudin. Aux noix, au spéculoos, aux pruneaux, aux raisins avec un maximum de persil selon la recette familiale et, nul doute qu’il serait fier de vous, votre père s’il était encore là de vous voir honorer la devise : « Un esprit sain dans un porcin ! » Vos clients ont fait des kilomètres pour acheter vos hectomètres de boudin qui auraient pu enguirlander bien des sapins de Noël sans aucun mal. Très souvent récompensé, mais quand on connaît vos initiales et, même si les médailles reçues ne sont pas olympiques, elles, je Paris qu’on aurait pu aller jusqu’à vous ériger une tour « F.L. ».

Vous aimez les cochons : même si tôt ou tard, vous finissiez toujours ...par leur rentrer dans le lard ! Oui, vous aimez les cochons. La preuve : vous avez un Sanglier comme beau-frère. En revanche, vous n’aimiez pas la bureaucratie et toute sa paperasserie austère. Quand il fallait, tous les trimestres, entériner les chiffres dans votre comptabilité, je comprends que vous préfériez, et de loin, en-terrine-r...les pâtés.

Après des années de bons et aloyaux services, vous arrêtez le travail, enfin ! Votre retraite, est d’ailleurs aussi bien préparée ...qu’un américain. Vous auriez pu visiter les basses-côtes ...de Normandie pour y faire des balades ou, voyager dans les Caraïbes, sur l’île de la Barbaque...euh... de la Barbade, Non. Même un city-trip à la mode de Caen ne vous tente guère. Vous préférez deux autres contrées, deux autres pays, deux autres univers : la côte d’Yvoir, celle qui mène au Tricointe, à une dizaine de kilomètres d’ici et le labrador, pas la province canadienne, mais le chien que sortez faire pipi.

Plutôt que bâtir des châteaux brillants en Espagne et les payer rubis sur l’onglet, vous préférez, en vacances, votre appartement près de Salou, modeste et douillet, où vous passez le plus Lecler de votre temps à profiter du soleil et à vous prélasser en écoutant la musique qu’écoutent les charcutiers à mon avis : les chansons du groupe Abats ou les 4 salaisons de Vivaldi...

Arbitre de football sur tous les terrains, à tous les niveaux. Vous avez même arbitré une rencontre de jeunes internationaux de 18 ans à Ciney, ville réputée pour ses belles bières et ses bovins.  Quand, vous entrez sur le terrain, comme Manneken-Pis, le sifflet à la main votre bouche est sévère alors qu’au boulot, toujours votre ...bouche rit ! Et il est vrai que le football fait partie intégrante de votre vie. Vous êtes fervent supporter du FC Barcelone, en Catalogne. Et comme le grenat de leur maillot s’apparente au rouge de notre bourgogne, vous allez à présent en déguster. Je ne vais pas prolonger l’attente. 

Ah, oui, encore une chose : désolé, dans la flamiche, ‘y pas de viande...